NO FORM, NO SHAPE

03.02.2024 - 07.04.2024

Pit Riewer

Vernissage le 03.02.2024 à 11:30

Nei Liicht

"No Form, No Shape" présente un nouveau corpus d'œuvres du peintre Pit Riewer dans le cadre de son exposition monographique inaugurale. Titulaire d'une licence en arts visuels en peinture de l'Académie royale des beaux-arts d'Anvers en 2022, Riewer entreprend un voyage dans les domaines de l'informe, intimement liés à l'énigme de la nuit. Cette exploration artistique s'accompagne d'une acceptation nuancée de l'abstraction au sein de son processus créatif.

Au cœur de cette exposition se trouve un engagement profond avec des expériences et des attitudes personnelles, particulièrement résumées dans un poème inspiré par une sortie en soirée. Le poème sert d'élément central, ancrant Riewer dans l'intensité et la nature transformatrice du moment présent et décrivant ce que l'on ressent lorsqu'on travaille avec des moments furtifs en tant que peintre. Les thèmes du changement, de l'intensité et de la méditation sur les moments éphémères sont entrelacés dans l'ensemble de son œuvre, créant un récit qui résonne avec les complexités de l'expérience humaine. Riewer reconnaît que l'abstraction prend une forme distincte lorsque des éléments figuratifs sont disséqués jusqu'à un point concentré de compréhension visuelle et émotionnelle. Des peintures de verres à cocktail ou de vues à l'extérieur de fenêtres invitent le spectateur à découvrir ces exercices d'aplatissement de notre plan visuel.

"No Form" et "No Shape" servent de points d'ancrage thématiques à l'exposition. "No Form" reflète une position de recherche permanente, mettant l'accent sur le mouvement et la transition. L'accent mis par Riewer sur la surface et son approche formaliste de la peinture sur des sujets dépeints témoignent d'une sensibilité artistique en évolution. D'autre part, "No Shape" se penche sur l'intensité, la forme et le geste du pinceau, et la définition d'un plan de couleur peint.

Le cœur de "No Form, No Shape" réside dans l'œuvre d'animation peinte Frame(s), dans laquelle Riewer dissèque une vidéo en 40 images et analyse la frontière entre le mouvement et la nature immobile de la peinture. L'œuvre s'inspire des peintures de figures expressives de Francis Bacon et de son utilisation des premières études photographiques du mouvement réalisées par Eadweard Muybridge. Frame(s) étudie le rôle du mouvement cinématographique et remet en question la différence entre le mouvement pictural et le mouvement vidéographique. La présentation d'une animation et de 40 images peintes à la main continue de remettre en question la dichotomie entre le mouvement et l'immobilité, la photographie et la peinture, et la réalité et la mémoire.

L'exploration de la nuit par Pit Riewer, enveloppée d'obscurité et d'ambiguïté, sert de thème central, rappelant les photographies de référence floues éparpillées dans ses archives personnelles. Ces images, qui font parfois l'objet de modifications numériques ou qui émergent des bizarreries d'une imprimante défectueuse, constituent la base du processus de superposition méticuleux de Riewer. Emulant le rythme mécanique des images imprimées, Riewer essaie de limiter consciemment ses gestes picturaux à des coups de pinceau horizontaux et verticaux, reflétant ainsi les qualités inhérentes de son matériel de référence imprimé.

En parallèle, des objets, des vêtements, des autoportraits et des bijoux dévoilent de profonds aperçus de l'exploration intime de l'identité physique de Riewer. Faisant l'analogie avec un DJ qui façonne des sons pour dicter un rythme à un public spécifique, Riewer, dans son rôle de peintre, élabore méticuleusement des récits visuels.

Il se plonge notamment dans le domaine fondamental des formes géométriques, généralement considérées comme les éléments constitutifs de la peinture. Rejetant l'adhésion rigide à ces formes, il se lance dans une recherche sur le remplissage des formes et l'interaction des couleurs, permettant au monde de se manifester sous la forme de champs de couleurs vibrantes. Cette approche nuancée contribue de manière significative à l'essence cinématographique et mélancolique qui imprègne ses peintures urbaines nostalgiques.

Dans le contexte de son engagement avec l'imagerie imprimée, une remise en question délibérée de son identité en tant que peintre se déploie. Alors qu'il est confronté à ses propres dysfonctionnements mécaniques, un dialogue introspectif émerge, cherchant à savoir s'il fonctionne simplement comme un imprimeur aux prises avec les irrégularités et les nuances de ses outils artistiques. Cette exploration contemplative tisse un lien étroit entre l'enquête thématique et les subtilités mécaniques du médium qu'il a choisi, ajoutant une couche de complexité à son processus artistique.

"No Form, No Shape" propose un voyage immersif à travers l'ambiguïté et l'absence de forme, invitant le spectateur à explorer les couches complexes de l'évolution artistique du peintre. L'œuvre incite à la contemplation de la nature fugitive des moments, de l'interaction entre la réalité et la mémoire, et de l'importance du geste. L'acceptation de l'abstraction par Riewer devient un fil conducteur, invitant le spectateur à apprécier l'équilibre délicat entre la dissection des éléments figuratifs et l'acceptation du pouvoir émotionnel de l'absence de forme.

Pit Riewer est lauréat du Prix Révélation du Salon du CAL et du Ministère de la Culture 2023.

Pit Riewer, 2024