Commissaire d'exposition : Danielle Igniti
Les centres d’art de la Ville de Dudelange accueillent le printemps [sic !] avec des expositions qui posent des questions sur nos environnements artistique, culturel et naturel – en concevant ces trois univers interdépendants comme formant un ensemble à la fois complexe, paradoxal et totalisant. Il s’agit pour cette session de poser à notre échelle et avec humour, sincérité et engagement les questions fondamentales qui concernent aussi bien la création contemporaine que nos modes de vie – notamment à travers les codes qui les régissent. À commencer par l’éternelle question que les spécialistes et non-spécialistes de l’art contemporain prennent tant de plaisir à réitérer depuis la fontaine de Marcel Duchamp (qui date tout de même de 1917 !) : Que c’est de l’art ? Question que les théoriciens de l’art ont prolongée par l’interrogation philosophique qui consiste à se demander Qu’est-ce qui fait art ? et que les trois artistes invités avec les deux commissaires aimeraient étendre ici en se demandant comment se fait, qu’est-ce que fait – ou qu’est ce que peut-faire l’art ? Quelles sont ses matières premières ? Quels sont ses rituels ? Quels sont ses lieux et ses rencontres ? Tout cela sur fond d’une hypothèse heureuse : puisque c’est la société qui produit l’art de chaque époque, ne pourrait-elle pas s’en inspirer dans la perspective de vivre autrement – justement dans le respect de nos environnements culturels et naturels ?
Eric Schumacher a été remarqué lors de la quatrième Triennale de la Jeune Création[1] qui a eu lieu en 2017 et pour laquelle il a choisit avec humour (et solidarité) de se servir des œuvres d’artistes non sélectionnés pour l’exposition et de créer son installation sculpturale à partir de leur mise en scène.
La remise en question de ce qui fait œuvre ou pas, de ce qui est sélectionné ou éliminé par le monde de l’art, ou par l’artiste quand il crée, constitue ici aussi le noyau du travail du jeune artiste luxembourgeois. C’est donc cette architecture sculpturale de la réutilisation qu’il remet en œuvre pour son exposition monographique au centre d’art Dominique Lang : en réutilisant des éléments trouvés, en éliminant des éléments gardés, en se référant aussi bien au modernisme qu’à un certain minimalisme, aux sculptures monumentales de l’espace public et aux petits objets décoratifs de la vie privée. Réflexion sur les formes d’abord, mais qui constitue aussi une réflexion concernant la production de masse, le recyclage, la mise en scène (de l’art et du quotidien) ; et, également, suggestion du rapport dialectique qui existe entre la collection d’objets et la création de déchets, ou encore, entre la mise en œuvre de jeux (de pouvoir) qui ne cessera jamais entre la « beauté », la perfection et leur renversement à la fois vandale et poétique.
[1] jet lag / out of sync, Triennale Jeune Création Luxembourg et Grande Région, Rotondes, Luxembourg (LU), commissaire d’exposition, Anouk Wies.?